[Analyse de Film] Ichi The Killer - Takashi Miike

Publié le par The Duke

L'ultra-violence

Le parfait équibre entre réalisme outrancier et surréalisme
grâce à la gestion des couleurs et à une dynamique de mise en scène




"Le cinéma peut tout dire, mais non tout montrer"
Une phrase, quelques mots, c'est tout ce qu'il suffit à André Bazin pour résumer un débat, une polémique vieux comme le cinéma et qui n'est pas prêt de s'arrêter.
La violence, jusqu'où peut aller sa représentation ? Des auteurs considéré souvent comme marginaux, subversifs permettent au monde cinématographique d'y réfléchir. Parmit eux on peut citer le brillant Paul Verhoeven ( La chair et le sang, Robocop ), le non moins interessant français Gaspar Noé ( Irréversible, Seul contre tous ) ou encore le japonais qui sur lequel nous nous pencherons Takashi Miike. Réalisateur prolifique et infatiguable ( il tourne en moyenne quatres films par an ), Miike assume et revendique son coté provocateur et son statut de cinéaste très controversé comme lui même le dit :"l'un des commentaires les plus courants lorsque l'on parle de ma filmographie, c'est que ce sont des films violents"
Déjà en 1999 son film Audition sème la discorde et les railleries. Pour certains il s'agit là d'un film fascinant, pour d'autre que d'un vulgaire exutoire qui n'a qu'une volonté, celle de choquer.
Quoique l'on puisse dire et penser, les films de Miike ne laissent personnes indifférents et ces métrages suscitent comme rarement des attentes importantes de la part des cinéphiles les plus curieux.

C'est en 2001 que sortira ce qui s'avérera jusqu'à aujourd'hui  son film le plus emblématique, mais aussi celui qui a le plus déchainé la critique de part son utra violence. Ce film c'est Ichi the killer ou Koroshiya 1 ( ichi signifiant 1 en japonais ), adaptation  fidèle du manga éponyme et ultra-populaire de Hideo Yamamoto.
Censuré en France comme dans la quasi-totalité des pays où il fut distribué pour son caractère extrêmement violent,  cela ne l'a pas empêcher de créer de part ce fait une promotion digne des plus grosse production hollywoodienne. Pour exemple, au Festival international du film de Toronto, le public avait reçu des pochettes pour vomir promotionnelles à l'effigie du protagonniste.

Au délà des controverses, cette oeuvre à part dans la carrière du réalisateur s'est vu couronné de nombreux prix et nominations :
-Prix des meilleurs effets spéciaux lors du Fantafestival 2002.
-Prix du meilleur film et meilleur réalisateur lors des Japanese Professional Movie Awards 2002.
-Prix du Jury lors du Festival international du film fantastique de Neuchâtel 2002.
-Nomination au prix du meilleur film lors du festival Fantasporto 2003.
-Prix du meilleur second rôle masculin (Shinya Tsukamoto), lors du Mainichi Film Concours 2003.
-Fantasia Ground-Breaker Award lors du festival FanTasia 2003.

Le film narre l'histoire de Kakihara, yakuza masochiste et bras droit du chef Anjo, qui se met à la recherche de celui-ci qui s'est en fait fait assassiné par Ichi, tueur ultra-émotif manipulé par Jijii.
Nous suivrons donc les déambulation de Kakihara qui n'hésitera pas à torturer certains de ces alliés et à se mettre à dos une partie de son clan. Une dualité s'installera entre la folie meurtrière de Kakihara et l'émotivité et la naïveté de Ichi. Le premier étant traquant le second jusqu'à un final digne d'un film de Lynch de par sa complexité de compréhension.
D'ailleurs pour bien comprendre l'univers du metteur en scène il est important de noté que dans une interview donné pour la sortie de Gozu Takashi Miike parle de David Lynch comme de son réalisateur favori, ainsi que de Paul Verhoeven dont le caractère subversif de son oeuvre le rapprochent du cinéaste japonais. Que ce soit la violence sexuelle dont il est souvent question chez le neerlandais et que l'on retrouve dans le film étudié ici, ou bien la violence plus viscérale, une réelle concordance se pose entre les deux hommes.
Autre point commun très important : l'importance du rôle de la femme, qui est souvent placé comme sexe dominant chez Verhoeven ( se rappeler le contesté Show Girl ou le magnifique Katie Tippel ) comme chez Miike ( Audition en est l'exemple le plus illustratif ). Dans Ichi The Killer le rôle de la femme est moins évident mais il est loin d'être absent. Effectivement, ici la femme se place comme élément déterminant puisqu'elle est à la base des pulsions de violence d'Ichi, mais elle est aussi un maillon important dans la quête de Kakahira puisqu'elle lui permettra de guider ces recherches. Cependant, dans ce film elle est toujours représenté comme soumise à la gente masculine, la quasi-totalité étant des prostitués, et souvent des femmes battues.

Si l'utra-violence d'Ichi The Killer a fait couler beaucoup d'encre et n'est pas au goût de tout le monde, il n'en reste pas moins un moment de bravoure technique et artistique qui a su à la fois transposer l'univers visuel du manga tout en se créant une identité propre.

Nous verrons donc ici comment cette ultra-violence, grâce à une prononciation très forte de couleurs vives et à une dynamique de mise en scène, permet à la fois de destabiliser le spectateur par un réalisme crue, et à créer en parrallèle, un surréalisme proche de l'univers du manga.

I -  La vivacité et la saturation des couleurs comme symbôle de la violence

1) L'opposition de style Kakihara/Ichi

Image 1 : Kakihara/Ichi : Opposition de style

Kakihara (Image 1 à gauche ) yakuza respecté et reconnu pour ses excès de violence, son sadisme et son masochisme est reconnaissable grâce à un physique particulier. Tout d'abord son visage présente de nombreuses cicatrice probablement du à des scarifications, et surtout à un sourire plus grand que nature puisqu'il a les deux cotés de la bouche coupés, qui restent fermés grâce à des anneaux métalliques, avec autour un bouc et une moustache.
Cependant ce qui nous interessera principalement c'est le travail de colorisation, autant physique que vestimentaire. En effet, ces cheveux blond décolorés représentent sa première forme notable d'"excentricité", ce qui le démarque du reste du gang, première marque de forte personnalité. Sur le plan vestimentaire, tout au long du film, il présentera une garde robe impressionante allant du long manteau rouge, à des chemises à paillettes roses,  en passant par un blouson de style eccossais. Un style vestimentaire souvent effeminé qui va de paire avec les sous-entendus homosexuels, notamment lorsque nous apprenons que Kakihara regretterai la disparition du chef de clan Anjo car c'était le seul qui lui donné un réel jouissance en le faisant souffrir. Il y a donc clairement ici une recherche de mise en abîme de la personnalité grâce à l'apparence physique du personnage. Pour exemple, lors de ses premières apparitions Kakihara à une tenue assez sobre, il porte un blouson noir sur une veste rouge. Durant ces scènes il n'a pas de comportement violent, ce n'est que peu de temps après, lorsqu'il extériorisera sa violence que l'excentricité de ces vétêments sera dévoilée.


Ichi (Image 1 à droite), quant à lui, à le visage candide, les cheveux bruns et est rasé de près. Au fil du film nous apprendrons qu'il est manipulé par Jijii qui lui fait croire qu'il a eu un passé douloureux pour qu'ensuite Ichi se venge sur le clan Anjo.
Son visage est empreint de souffrance, d'innocence et de vulnérabilité. Rien ne laisse à penser qu'il serait capable de commettre le moindre meurtre.
Le plus souvent, il est affubler d'une combinaison entièrement noir, muni de protection au niveau des articulations et possédant un lame rétractable à l'arrière du pied.
L'important est ici le chiffre "un", désigant à la fois son prénom et le fait qu'il soit le meilleur dans son art du combat et du meurtre, inscrit en jaune vif. Cette touche de luminosité cloisonné par la couleur la plus sombre qui soit marque ici un grain de folie dans un esprit renfermé, dépressif, souvent en proie au doute et à la frustration. Tourmenté, Ichi est souvent excité à la vue de femme violenté, ensanglanté, et il est parfois sujet, lors d'humiliation ou de souvenir humiliant, à des pulsions de violence lors desquels il tue, découpe ces ennemis grâce à ces talents en arts martiaux et à son uniforme. C'est en cela, et cela seulement qu'il se rapproche de Kakihara, en dehors de ces pulsions, Ichi reste quelqu'un de très vulnérable et renfermé sur lui même.

L'opposition entre ces deux personnalité est donc retranscrit ici par des couleurs plus ou moins vives selon une folie plus ou moins prononcé, Kakihara et son excentricité hors du commun contraste avec l'introvertie Ichi. Ainsi nous nous retrouvons donc avec sans réel "méchant" ni "gentil". Mais nous somme plutôt plongé dans un univers cruel où le manichéisme ne semble pas vraiment envisageable. Même si Kakihara représente le coté le plus cruel de cet univers,  il n'est pas présenté ici comme la véritable menace, mais plutôt comme un anti-héro qui ferait tout pour retrouver son patron. De la même façon Ichi pourrait être vu comme le héro puisqu'il croit se venger contre les injustices qu'il aurait subi dans sa jeunesse. Mais il n'en est rien, lui aussi peut se poser comme une sorte d'anti-héro, de héro raté.

Ces deux personnages, dont les caractères et les styles vestimentaires sont poussés à l'extrême, en deviennent limite caricaturaux. En cela déjà nous pouvons donc dire que l'imagerie se rapproche de celle des mangas, dont les personnages ont la plupart du temps des personnalités très tracés. Il y a ainsi une certaine distanciation par rapport au monde réel.

    Cependant, l'importance des couleurs dans la représentation de la folie, de la violence ne s'arrête pas au physique et au style vestimentaire, les espaces colorés faisant souvent place à des scènes d'ultra-violence souvent plus proche d'un univers surréaliste que d'un univers réel.

2) Un univers d'ultra-violence très coloré

Image 2 : Kakihara s'apprêtant à se couper la langue

Dès la deuxième minutes du métrage un plan commence avec au premier plan une femme de dos, en gros plan, et de face un homme qui la frappe violemment au visage, le poing en sang. Le ton est donné. La violence sera au centre du film.
Ce qui marque au premier regard, par rapport à la première scène, c'est cette vivacité des couleurs. Premier plan de la séquance au couleur jaune ( les murs et les visages ) et vert ( les décors en arrière plan et la chemise de l'homme ), cela tranche avec les tons plus ternes, plus sombre des deux  premières minutes ( même si il est important de noté la lumière rouge, couleur très souvent présente, rappellant la couleurs du sang, élément essentiel du film ).
Dans les plans suivants, on découvrira que la femme qui s'est fait frappé est vétu de rouge, faisant le lien avec sa bouche désormais ensanglanté. Il s'en suivra une scène de viol, en montage alterné avec des plans extérieurs annonçant la présence d'Ichi, dans une lumière très bleu, souvent utilisé pour les films de suspences, instaurant un climat de mystère, de froideur. C'est ici aussi le cas puisque nous ne connaîtrons pas l'identité de ce voyeur qui se masturbera devant la scène de viol.
Cette différences de température entre l'intérieur et l'extérieur ( le jaune symbolisant la chaleur ), représente bien les actes qui s'y passe : la violence extériorisé qui se déroule à l'intérieur est souligné par la vivacité des couleurs chaudes, alors que dehors, dans un acte solitaire et retenu, Ichi intériorise ces pulsions.

La deuxième scène représentative de la corrélation entre les couleurs et la violence se situe un quart d'heure plus tard.
Dès le premier plan, en plongé, sur la chevelure blonde de Kakihara qui fait cuire des crevettes, nous sommes plongé dans une ambiance chaude, donc aux colories jaunes. La manche de son bras droit nous indiquant qu'il est habillé d'une chemise de style écossaise rouge, couleur une nouvelle fois présente.
Une contre plongé nous présente ensuite le visage souffrant de Suzuki, accroché dans les airs par des hameçons plantés dans sa chaire. Un plan sur son dos nous présente ces tatouages aux teintes colorées, et une plongée totale nous fait découvrir un sol rouge. Il s'en suivra une torture de Suzuki de la part de Kakihara, le rouge et le jaune s'imposant comme les couleurs dominantes.
Tout comme dans la précédente scène, celle ci est séparé grâce un montage alterné par une scène de yakuzas devant leur poste de surveillance, en train d'observé la torture de Suzuki. Ce que l'on constate lors ces quelques plans c'est une images beaucoup plus ternes, beaucoup moins colorés, qui correspond bien la tranquillité, à la sérénité qui les entoure.
La torture prendra fin avec l'arrivée du chef Funaki et de ces hommes. Ici encore un lien entre couleur et violence se dessine parfaitement. La totalité des hommes de Funaki sont habillé en noir, et un en blanc, quand à lui il porte un costume mauve foncé. C'est lui même qui finira par faire preuve d'énervement en braquant son arme sur Kakihara, et c'est Kaneko,homme de Kakihara et vétu d'une vive veste rouge, qui pointera son arme sur Funaki.
Les seuls hommes faisant preuve d'agressivité sont donc ceux qui porte des couleurs, en l'occurence Kakihara, Kaneki et Funaki, tous trois dans les tons rouges.
Une véritable cohérence se dégage donc de cette séquence où la violence est toujours imagé de façon coloré.

La troisième séquence soulignant ce travail sur la couleur est une des scènes les plus dures à regarder. Elle débute à la minute 25 avec en une réunion entre Funaki et Kakihara pour discuter de ce qui c'est passé dans durant la séquence précédemment étudiée.
Autour d'une table cinq hommes, tous en noir sauf Kakihara vétu d'une veste violette. A la droite du cadre, en bord cadre, on devine un hors champ à la lumière rouge. C'est dans cette direction que se dirigera Kakihara, voulant s'excuser.
Il se présentera donc devant les personnes présente, à genoux, avec en fond un mur et une lumière d'un rouge très intense. Il sort une lame, une serviette verte proche du fluo qu'il se noue autour du coup, et face à la caméra il se coupera un morceau de langue ( Image 2 ). L'alternance de plans colorés sur sa langue avec des plans ternes voir même sombres sur les visages stupéfiés des spectateurs donne toute sa valeur à la notion étudié ici, l'intensité des couleurs correspondant à l'intensité de la violence à l'image.
A la fin de la séquence, Kakihara qui a finit de se couper la langue revient vers la table, la couleur générale du champ redevient plus sobre pour clore ce qui aura été une épreuve difficilement soutenable pour les spectateurs.

Enfin la quatrième et dernière séquence analysée recoupe la première puisque l'on retrouve les trois même personnages, dans le même lieu, et commence de la même façon. Ce qui fait la différence c'est l'entrée d'Ichi dans la chambre alors que la femme se fait violer, il est en proie à des fashs de son passé fictif, celui que lui invente Jijii.
Les tons de couleurs sont les mêmes que dans la première séquence, du jaune au vert en passant par le rouge/rose que porte une nouvelle fois la prostituée. Les premiers plans sur Ichi à l'extérieur, qui regarde la scène par la fenêtre, sont à nouveaux plongés dans une lumière bleu. Une fois à l'intérieur il coupera verticalement en deux le corps de l'homme puis, sans le vouloir, tuera la femme d'un coup de batte. Des images souvent d'une extrème violence, dont l'intensité des couleurs est toujours là pour souligner la caricature qui en est faite. Car c'est en cela que la lumière est interessante.


L'utra-violence, comme nous avons pu le voir dans les quatres séquences étudiées se déroule toujours ( en tout cas très souvent ) dans un espace, celui du champ, à la luminosité très prononcée et aux couleurs vives d'une rare intensité.
Cette ambiance chaude et vive crontraste avec la violence qu'elle présente. Effectivement, dans la majorité des films présentant des scènes d'ultra-violence, l'ambiance n'est pas du tout le monde, l'image est souvent plus sombre, plus ternes, plus brut.
Ce choix visuel important de Miike, peut s'expliquer de deux façons.
La première serait une volonté de désacraliser la violence, l'horreur qui y est montré. Il donne une autre dimension aux scènes qu'il montre,  en quelques sortes il les démysthifie, les vide de leur sens et de leur contenue. Le coté terrifiant et affreux de celles-ci est contre-balancé par une lumière chaude aux couleurs plutôt joviales. En dehors des scènes de sauvagerie l'éclairage se fait plus banal, plus proche de la réalité. L'effet produit est donc double, il y a à la fois une mise en abîme des séquences de violences, et en parallèle, une transposition de celles ci en dehors de l'univers réel auquel appartient le reste du film.
La deuxième façon d'expliquer ce parti pris et qui est loin d'être incompatible avec la précédente, est une volonté de se rapproché de l'univers du manga en s'éloignant de la réalité.

Même si les mangas ne possèdent pas de couleur, il est possible de voir par cette utilisation abusive de couleur une envie de donner un caractère "bande dessiné", "comics" à l'oeuvre.

Quoiqu'il sen soit,  le choix des lumières, comme nous venons de le voir est ici déterminant puisqu'il détermine le degrès de folie, de violence des scènes ou plus spécifiquement des personnages. Ceci entraînant une distanciation par rapport au monde réel, et un rapprochement de l'univers du manga.
Cependant, un procédé technique vient enrichir celui-ci, il s'agit de la dynamique de mise en scène qui va rythmé les scènes de violence tout en créant un univers se plaçant au delà du réel.



II - Dynamique de mise en scène

1) Effets de style

Image 3 : Long, un des sbire de Jiji, à droite au ralenti, à gauche en accéléré

Le premier effet de style notable se situe dès le premier plan. L'image est un flou, on distingue une rue illuminé par les enseignes des magasins. Rien ne nous dit si l'image est fixe ou non, en tout cas un mouvement de caméra nous entraine vers l'avant, il s'agit surement d'un bullet time stylisé, que l'on retrouvera plus clairement par la suite. L'avancé dans la rue est ponctué de plan sur les rotations de jambes de quelqu'un qui pédale sur un vélo, et de gros plan sur la chaîne du vélo. Ces rotations traduise un cycle, un perpétuel recommencement, Takeshi, fils de Kaneko, reprenant sous doute le flambeau de Ichi.
Le premier Bullet Time réellement visible a lieu alors que Kaneko discute avec son patron. La caméra parcours la pièce en tout sens pendant que le temps es figé. Il y a donc une déformation de l'espace temps par rapport à notre réalité.
Un distanciation s'opère donc entre la réalité fictive qui nous est présenté et notre réalité en tant que spectateur. Alors que notre regard traverse l'espace fictive, le temps y est figé.

Un autre effet utilisé quelques fois est le ralenti. On le trouve pour la première fois à la 42ème minute. Alors qu'un de ces collègue vient de se faire tuer, Long au coté de Jijii frappe violemment le grillage ( Image 3 à gauche ). Insérer à ce moment, l'effet de ralenti accentu la frustration du personnage et permet au spectateur de prendre à nouveau une distance par rapport à la réalité.
La même chose se produit lors de l'accélération, avec vraissemblablement le même personnage, Long, caché derrière un masque de carnaval. La scène à lieu à 1heure 08minutes et 50secondes. Alors qu'il se déplace dans une rue en plein milieu de la foule, ces mouvements sont accélérés, ne semble plus humains et complétement détaché du monde réel ( Image 3 à droite ). De ce fait, il est  associé à un esprit, à une présence fantômatique plutôt qu'à un humain. Il se déplace face caméra, comme si il lancé un regard caméra. Peut être est ce pour annoncer la mort prochaine du personnage ? Peut être est ce un clin d'oeil au spectateur, pour lui dire que le pire n'est pas encore passé ? Dans tous les cas à nouveau une distance brechtienne qui tient d'une certaines façon le spectateur à l'écart de ce qu'il voit.

Dans la scène finale, un long ralenti débute à partir du moment ou Kakihara s'est percé les tympans, jusqu'au coup de pied d'Ichi, puis reprend lorsqu'il tombe dans le vide. La suite nous permettra de comprendre qu'à partir de l'instant ou Kakihara n'entend plus, ce qui s'en suit ne relève que de son fantasme,  le fanstasme, d'un duel contre Ichi, qu'il image comme son double, et qu'il n'obtiendra jamais. Par l'utilisation du ralenti, il y a donc ici une volonté d'entraîne le spectateur vers une réalité qui n'est ni la sienne, ni celle de la réalité filmique puisqu'il ne s'agit que du vision fanstasmé du réel par l'esprit de Kakihara.

Les effets de style, modifiant le temps filmique, comme le bullet time, l'accéléré ou bien le ralenti témoignent donc, comme nous l'avons vu, d'une volonté de séparer la réalité filmique, parfois plus proche d'une réalité fanstasmé, d'un surréalisme imagé ou imaginé par  l'un des personnage ou bien par le metteur en scène lui même, comme vu précédement, de la réalité du spectateur qui  est tenu à l'écart de ce qui lui est montré. Cela crée une r"elle distanciation envers le public qui n'est donc pas impliqué dans ce qu'il voit/
En plus de celà, l'utilisation de ces effets apportent une touche stylistique, un réel esthétisme visuel.

Andy Warhol disait : "certaines personnes, même des personnes intelligentes, disent que la violence peut être belle. je ne comprends pas cela parce qu'il n'y a que de beaux instants et de tels instants ne sont jamais beaux pour moi. "
Takashi Miike, quant à lui, essaye par ces effets visuels, ces colories que nous avons pu étudier, de créer une esthétique de la violence, de faire valoir une esthétique là où elle semble le moins probable en la rapprochant de l'univers du manga dont est tiré l'histoire.
C'est aussi en ce sens que viendra s'ajouter une découpage épileptique, surdécoupé, qui rompt avec la mise en scène classique et s'inscrit dans l'univers visuel du manga.

2) Des scènes de violence au rythme epileptique

Image 4 : Jump-cut sur Long

Au delà du rythme hyper-soutenu de la scène introductive déjà mentionnée à propos du bullet-time, d'autre, dans un registre différent, en son tout autant emblématique.

La première se situe vers la 39ème minute, un scène déjà abordé au sujet du travail sur les couleurs.
Ichi vient venger Sailor, la prostitué battu par son compagnon. Il lui coupera alors le cors en deux dans le sens vertical avant de la tué par accident. Le monvement de jambe tranchant le corps de l'homme en deux parties est fractionné en six plans, d'une durée total de trois secondes .
Le mouvement débute à 39minutes et 14 secondes, nous pouvons le décomposer de cette façon :
-Gros plan sur son pied qui commence le mouvement
-Plan rapproché taille en légère plongé, le mouvement de la jambe se dessine
-Plan en contre plongée de sa jambe qui prend la direction de la caméra ( plan subjectif de l'homme agressé )
-Plan en contre plongée derrière Ichi, son pied "glisse" sur le corps de l'homme, de hant en bas
-Plan rapproché en contre plongée de l'homme, ses vétements se déchirent
-Gros plan sur le pied d'Ichi, sa lame vient sur pénétrer le sol.
Fin du mouvement à 39minutes et 17secondes.

Le temps moyen des plans est donc d'une demi seconde. Notons qu'une grande partie des plans sont constitués de plongée ou de contre plongée.
Ce que ce découpage évoque à première vue c'est une vitesse d'excution de la part d'Ichi.
D'autre part, du fait de leur vitesse, ces plans ne permettent pas aux spectateurs de voir le mouvement exacte qui lui est montré. Il ne reçoit que des images qu'ils voient comme quasi-fixe. Si l'on ajoute à cela la composition du cadre, avec ces plans incliné, nous pouvons alors dire qu'il y a une nouvelle fois une volonté de se rapprocher de l'univers du manga.
Effectivement le découpage étudié ici n'est pas sans rappeler les cadres de bandes dessinées ou de manga.

Un deuxième exemple est tout aussi parlant aux alentours de 1heure et 34minutes.
Karen qui se fait passer pour la femme qu'a regardé se faire violer Ichi plus jeune, a décidé de le séduire. Mais Ichi, interprétant mal les paroles de celle-ci décide de la découper "en petits morceaux".
A 1h34m10s commence une série de jump-cut, effet toujours destabilisateur pour le spectateur, qui donne ici de la nervosité à la mise en scène et soutient le suspence que travail déjà la bande son.
Puis à 1h34m27s il y a un découpage très rythmé du mouvement d'Ichi coupant la jambe de Karen, en trois plan d'une durée total d'environs une sconde.
-Gros plan sur le visage d'Ichi
-Plan général de la pièce, en plongée quasi-totale au dessus du visage de Karen, Ichi lance son mouvement de jambe
-Gros plan sur le pied d'Ichi qui entraine la caméra en travelling rotatif.

Comme précédement ce découpage, au delà de rythmé et de donné de la vitesse aux mouvements d'Ichi, permet de fidéliser, de rapprocher la constrction de la mise en scène par rapport à celle du manga.

Un dernier procédé rythmique utilisé doit être noté. Il s'agit à nouveau d'un jump-cut, se situant environs deux minutes plus tard à 1h36m10s.
Long s'est fait capturer par Kakihara qui le torture ( Image 4 ). Il est assis sur une chaise, le visage déformé par des aiguilles qui lui transpersent la peau.
En plan fixe, pendant trois secondes s'enchaînera 6plans de Long gesticulant sur le fauteil. Cela amplifie la souffrance, tout en destabilisant le spectateur qui ne sait pas si il s'est passé quelque chose entre les différents coupes. Une nouvelle fois, la mise en scène le tient d'une certaine façon hors du film.


Si Takashi Miike avait voulu donné à ces scènes un caractère le plus proche possible de la réalité, leur donner un aspect plus dures, plus agressif vis à vis du spectateur, il autait sans doute opté pour une approche plus frontale, plus brute et plus simple, sans effet de mise en scène, sans artifice.
Hors ici, nous voyons bien qu'il cherche à créer quelque chose de différent, à atteindre une autre dimension que celle de la réalité. Il a voulu crée un lien entre son film et l'univers du manga.


Conclusion


"La violence est ce qui ne parle pas."
Par cette seule phrase de Gilles Deleuze, nous pouvons dire clairement que a vision de la violence est à l'opposé de celle de Takashi Miike dont les films sont souvent violents, et toujours parlants, dans tous les sens du terme.
Comme nous avons pu le voir ici, la violence présente dans Ichi The Killer n'en est pas moins crontrasté.

Effectivement, au delà du violence brutal, laissant le réalisme de certaines séquences destabiliser le spectateur par des images insoutenables, il y a une véritable recherche d'une esthétique surréaliste, sinon proche de celle du manga. A la fois par le contraste et la saturation des couleurs Miike a su donner au scène de violence une portée qui va plus loin que la réalité, tout du moins qui s'en écarte.
Grâce à sa dynamique de mise en scène et notamment par des procédés de style ou des découpages ultra-rythmés, le film tient à l'écart le spectateur en lui rappelant à plusieurs reprise que ce qu'il voit est un film, qu'il s'agit d'une réalité imaginé, d'un fantasme imagé de la même façon que Kakihara, dans la scène finale, s'invente sa propre mort.
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